Une équipe japonaise menée par Yoshihiro Noda (département de neuropsychiatrie de l’université Keio de Tokyo), a récemment rapporté les résultats d’une étude en vie réelle de la rTMS chez des patients souffrant de “Covid long” dans la revue Asian Journal of Psychiatry (Rang A, IF 9.5). Les résultats sont encourageants et montrent notamment une certaine amélioration des symptômes dépressifs et des fonctions cognitives (notamment du “brain fog”).

La population traitée était un sous-groupe d’un vaste projet de recherche visant à élucider les mécanismes de la rTMS et à identifier les prédicteurs de la réponse thérapeutique à ce traitement. Leur étude a été menée de mai à septembre 2022, avec des patients dont le diagnostic de COVID-19 avait été confirmé par un test PCR dès janvier 2020. Les 23 participants à l’étude, âgés de 20 à 70 ans, ont été identifiés parmi les patients présentant des symptômes neuropsychiatriques apparus après avoir contracté le COVID-19. Aucun des participants n’avait reçu de psychotropes au moment de leur inclusion dans l’étude ou pendant la cure de rTMS.
Au début de l’étude, les patients présentaient une dépression modérée, avec un score moyen de 21.2 sur la MADRS et de 12.9 sur la PHQ9. La mesure moyenne de l’état de performance (EP) de la difficulté des activités de la vie quotidienne comme indicateur de la fatigue chronique et de la léthargie était de 5,4 (±1,6). Le score moyen du Perceived Deficits Questionnaire-Depression 5 item (PDQ-D-5) pour évaluer la fonction cognitive était de 10,0 (±5,2).
Les séances de rTMS ont été faites trois fois par semaine pour un total de 20 séances. Chaque séance consistait en une stimulation iTBS du cortex préfrontal dorsolatéral gauche (DLPFC) suivie d’une rTMS en basse fréquence du cortex orbitofrontal latéral droit (COF). Ils ont décidé de proposer ce protocole multisite car il avait été fait avec succès dans des dépressions résistantes (protocole de Feffer et al.).
Le protocole a permis une amélioration cognitive, notamment du “brouillard cérébral” (brain fog) et une amélioration significative des des dysfonctionnements exécutifs. Le score MADRS moyen après la curée était à 9,8 (±7,8). 65% des participants étaient en réponse (amélioration d’au moins 50% des scores) et 70% d’entre eux étaient même en rémission totale. Par ailleurs la plupart des participants étaient subjectivement conscients de l’amélioration, ce qui s’est reflété dans les auto-questionnaires, et aucun participant n’a montré de détérioration de la fonction cognitive à la suite des séances de rTMS.

En revanche, le protocole n’a été que partiellement efficace en ce qui concerne la fatigue chronique due à un long COVID : de nombreux patients souffrant de fatigue chronique n’ont connu qu’une amélioration partielle et certains de leurs symptômes sont réapparus progressivement après la fin du traitement.
Cette étude présente de nombreuses limites (vie réelle avec petit nombre de participants) et des essais de plus grande envergure, idéalement en RCT et des évaluations de suivi supplémentaires, doivent encore être menés, mais les auteurs concluent que la rTMS devient une option envisageable pour les troubles neuropsychiatriques post-covid.
[MISE A JOUR NOVEMBRE 2023]
D’autres études viennent enrichir nos connaissances sur l’intérêt des techniques de neurostimulation dans le covid-long.
Une autre étude japonaise (encore) à utilisé de la rTMS sur les lobes occipitaux et frontaux chez 12 patients souffrant de fatigue chronique et de dysfonctionnement cognitif trois mois après l’infection par le coronavirus. L’une des particularité de cette étude est d’avoir proposé plusieurs échelles (de fatigue, d’apathie, etc.) mais également un Wechsler Adult Intelligence Scale-fourth edition (WAIS4) c’est à dire … un test de QI !
Par ailleurs une étude en tomographie par émission monophotonique de N-isopropyl-p-[123I]iodoamphétamine (SPECT) a également été réalisée.
Après dix séances de rTMS, aucun effet indésirable n’a été retrouvé et des résultats particulièrement intéressants sont mis en avant. L’âge moyen des sujets était de 44 ans et ils souffraient de troubles depuis plus de 6 mois.
Toutes les échelles se sont améliorées : L’échelle de fatigue (BFI) à 5,7 en moyenne avant l’intervention, a diminué de manière significative à 1,9 après l’intervention. L’échelle d’apathie (AS) est passée de 19,2 à 10,3 et surtout tous les sous-items du WAIS4 ont été améliorés ! Le quotient intellectuel global est passé de 94,6 à 104,4. Le résultat le plus intéressant est sans doute que l’hypoperfusion dans les lobes occipital et frontal bilatéraux observée en SPECT au début de l’étude s’est atténuée en étendue et en gravité après les dix séances, ce qui permet de montrer une corrélation “fonctionnelo-clinique” (même s’il reste difficile de savoir si ces modifications sont causes ou conséquences).
On regrettera une fois de plus que cette étude n’ai pas été réalisée contre placébo car cela en réduit considérablement la portée, mais cela reste un résultat encourageant qui mérite réplication.
D’autres éléments vont également dans le sens d’un effet bénéfique de la rTMS comme c’est par exemple le cas avec ce case report sur un homme de 36 ans souffrant de dyspnée, d’anosmie et de “brouillard cérébral” (brain fog) depuis 2 ans à la suite d’une infection à coronavirus. Après 10 séances d’un protocole de rTMS guidé par l’électroencéphalogramme (EEG) du patient tous les symptômes (humeur, odorat et brouillard cérébral) ce sont améliorés, même la dyspnée a diminué avec un gain de 11% du volume expiratoire forcé par rapport à la capacité vitale forcée. L’EEG post-traitement a montré un passage d’ondes delta prédominantes à des modèles d’ondes alpha plus synchronisés pendant l’état de repos, ce qui laisse de nouveau penser que c’est bien l’effet de la stimulation qui a eut un rôle dans l’amélioration, mais encore une fois, ce n’est qu’un case report et de plus vastes études contrôlées sont nécessaires.